MAKWA JOMA : l’art au féminin
« En art comme en amour, l’instinct suffit » nous dit Anatole France et ce n’est pas Makwa Joma qui nous dira le contraire. La jeune artiste de 23 ans – slameuse et danseuse de Tamatave – avoue avoir choisi la scène et l’écriture par instinct.
Grandir sur scène
En 2011, une adolescente fait une double découverte à l’Alliance Française de Tamatave : la scène et l’amour de la scène. Elle avait alors 14 ans. Se fiant à son instinct et répondant présente à chaque appel du cœur et des mots, Makwa Joma a trouvé sa voie. Celle qu’elle a « suivie par instinct » nous confie-t-elle. En grandissant, au fil du temps et des pages, sa plume trouve ses couleurs et sa voix/voie. Sa poésie est à la fois « calme et rythmique », non sans être percutante et engagée. Les épreuves et les rencontres l’ont forgée. L’expérience l’a éduquée. Chaque scène est une étape pour sortir de l’artiste de sa chrysalide. Aujourd’hui à 23 ans, forte de près de 10 ans de carrière, elle compte parmi les plus prometteuses des jeunes artistes de la Grande île. Ses mots sont voyages et son corps, porteur de messages. « Mon amour pour l’art devient mature et indélébile » nous dit-elle au passage.
Semer les bonnes graines
Pour elle, « un artiste-poète est un porte-parole de la société. » En ce sens, c’est au cœur de la société que Makwa Joma puise son inspiration. Elle y déniche les bonnes graines pour semer au vent ce que son cœur lui dicte. L’écriture n’est pas seulement un refuge, mais également une plume qui « recouvre une multitude d’histoires et de secrets » pour reprendre ses termes. Elle est fortement influencée par la réalité, ses textes et performances sont les reflets de ces univers où Madagascar révèle ses mille facettes. Amoureuse de son île, Makwa Joma n’hésite pas à relayer les réalités cuisantes, à crever l’abcès en faisant éclater des vérités et des mensonges, les maux qui gangrènent le pays. Elle s’engage à « défendre des cas fréquents ou des cas que personne n’ose parler… » Son engrais ? « Avoir l’amour pour l’écriture » nous annonce-t-elle. Puis, sa force motrice reste la soif de partage. Pour elle, il est important de « partager le mot juste pour nous inspirer la Justice, l’Amour et la Paix. La bienveillance de l’Humanité »
Récolter ce que l’on sème
En cultivant les bonnes graines d’espoir, de changement et de prise de conscience, des années durant, Makwa Joma récolte ce qu’elle sème. Elle prend son rôle d’artiste au sérieux et admet avoir une « grande envergure de responsabilités ». Bien que mener une carrière d’artiste ne soit pas vraiment évident dans le pays, elle continue de transmettre des messages forts. Aujourd’hui, elle peut s’estimer « fière de présenter son (mon) pays et porter notre drapeau à travers le monde grâce à mon art. »
Souffler les mots…
Makwa Joma inspire la jeunesse actuelle et rayonne dans le milieu artistique national, africain et international. Ces 10 ans n’ont pas toujours été faciles, mais « avec du courage et de la conviction, on peut réussir tout ce qu’on entreprend » et comme on dit souvent, « le travail est toujours récompensé » estime-t-elle. Pour la jeune slameuse et danseuse, il faut avant tout « oser ». « Izy koa avo ny tanjogno, sorogno vatana ».
« Connaître soi-même, c’est connaître sa propre valeur
Alors,
désormais, aide la personne que tu es à être qui tu es réellement. »
Extrait du texte « Femme de Valeur » – Makwa Joma
NA HASSI
Crédit photo 1 : Hanna Rochetaing Photographe
Crédit photo 2 : DJAOMISY David Hanta Rosa
Notice biographique
JOMA Fidelis Tinnah naît le 23 octobre 1997 à Tamatave, Madagascar. Makwa Joma fait sa première scène à 14 ans à l’Alliance Française de Tamatave et n’a cessé depuis de voyager avec ses mots.
Elle participe à de nombreuses manifestations artistiques dans la Grande île, comme le festival international ART-IARY (Fénérive-Est), Festival international Stritarty (Diego-Suarez) ou encore Festival Angaredona. À partir de 2016, elle multiplie les apparitions à l’étranger avec le Festival Slamer un pied sur la lune (Comores), Résidence Libres en Slam (Belgique), 8e jeux de la Francophonie (Côte d’Ivoire) ainsi qu’une tournée à La Réunion.
Makwa Joma est également lauréate de nombreux prix artistiques à Madagascar et à l’étranger, entre autres : Prix Africa 35.35 ; projet SOFACO (African Culture Fund), projet Demain sera mien (Fonds de dotation HY), 3in1Pro (La Réunion), SlamMédia (Madagaslam et Rencontres du Film Court)… Artiste engagée, elle est également lauréate du concours sur la protection de l’environnement, organisé par Madagascar Health and Environment, soutenu par David Thoreau, National Geographic, Harvard University et Planetary Health Alliance.
La danse est une discipline qui complète actuellement son art oratoire. Elle fait ses débuts au sein de My Crew Compagnie, mais a également collaboré avec d’autres groupes comme Tahala Compagnie ou encore Cie Andrabe. Elle a participé à la résidence de danse contemporaine par les chorégraphes Anne Charlotte (France) et Manon Parent (Allemagne). Elle a suivi une formation de danse contemporaine africaine par la chorégraphe Nanie Oliva (sortante Ecole de Sable – Sénégal). Elle a fait une formation de breakdance au B-DihyCrew (Madagascar) ainsi qu’une formation des formateurs par le chorégraphe et directeur du festival Sagam : Stephen Bongarçon (Maurice).