CRAAM, le feu sacré de la culture
Par INDIGO
Raviver la flamme de la culture contemporaine et des autres expressions culturelles. Ce sont les défis lancés par les initiateurs de l’Association Craam.
Le Centre de ressources des arts actuels de Madagascar (Craam) cherche à contribuer au développement et au rayonnement du monde artistique malgache. Il veut également promouvoir la créativité chez les jeunes ». Une telle profession de foi pourrait sembler prétentieuse, mais elle sonne comme une évidence dans la bouche de Hobisoa Raininoro, une jeune femme qui milite depuis des années pour l’émergence culturelle de la Grande île. Il ne faut pas se fier aux apparences. Sous ses airs de fille fragile et fluette, elle est à la tête d’une association énergique qui révolutionne, à sa manière, le monde malgache de la culture et des arts vivants, à travers le Craam qu’elle a fondé avec ses amis issus des rangs de l’Association des diplômés en médiation culturelle de l’Université d’Antananarivo (AMDC).
Tanière
Pour s’en convaincre, rien de tel qu’une petite escapade dans la tanière de ces médiateurs culturels. Sous une imposante ombrelle réalisée par l’artiste-plasticien Nonoh Ramaro, les stagiaires écoutent religieusement le formateur. Ici, au cœur du campus universitaire d’Ankatso, l’on croirait qu’il s’agit d’étudiants. Que nenni ! Ces apprenants sont des danseurs professionnels venus dans le cadre du festival de danse Labdihy. Ici, arabesque, ballonné et autre balestra se conjuguent au présent contemporain. Une session de formation que le Craam accueille pour une semaine, comme de nombreuses autres depuis sa mise en place. Si Ankatso est un lieu d’apprentissage, le bâtiment du Craam est un lieu de vie et de culture. La jonction établie entre les arts et les lettres, en somme. C’est aussi un espace conçu pour nourrir et pour stimuler la créativité. Au fil des années, le bâtiment est le refuge et, à la fois, l’épicentre de l’association Craam. La construction de cet espace a comblé un manque dans le campus d’Ankatso, vivier important d’artistes, de décideurs, de brillants cerveaux, mais qui péchait par l’absence d’offres culturelles, à part les festivités épisodiques organisées par les natifs de telle ou telle région de Madagascar. Comme la culture a souvent horreur du vide, avec Tanjona Rabearivony, Hobisoa Raininoro va lancer ce défi assez fou en octobre 2011.
Richesse créative et esthétique
Le pari est suffisamment audacieux pour avoir été plébiscité par les artistes et les partenaires techniques et financiers. Le premier challenge relevé sera la mise en place d’un annuaire pluridisciplinaire en ligne des artistes et des acteurs culturels malgaches. « À Madagascar, il n’y a pas suffisamment d’information culturelle et artistique. Les ressources qui soient tout à fait neutres et qui ne dépendent, ni du public ni du privé, sont peu nombreuses, explique Hobisoa Raininoro. Nous avons travaillé à ce que les informations sur les artistes malgaches ne soient plus éparpillées, diffuses, diluées, voire tronquées, afin que les opérateurs et professionnels de la culture, d’ici et d’ailleurs, perçoivent la richesse esthétique et créative de la Grande île ». « Dans un pays où les structures font défaut, cette initiative a été accueillie à bras ouverts par les acteurs culturels », confie Domoina Ratsara, journaliste culturelle et collaboratrice pour le magazine panafricain traitant du cinéma, Awole. Bien que le travail soit loin d’être terminé – « nous sommes à près de mille artistes », apostrophe Hobisoa Raininoro – ce premier pas incitera à aller plus loin et à accélérer les démarches pour établir une jonction avec l’Office malagasy du droit d’auteur (OMDA). Pour l’instant, ce dernier « ne joue pas le jeu », déplore le leader du Craam, alors qu’il a entre ses mains un répertoire de près de six mille artistes. Il faut dire que, comme dans d’autres domaines de la société malgache, « la volonté politique fait souvent défaut ». Au début, même le rectorat de l’université était quelque peu sceptique. À défaut d’un véritable consensus, le plus grand soutien de l’association vient peut-être des jeunes générations. « Les artistes émergents nous font confiance sur nos projets », se réjouit Hobisoa Raininoro. […]