Entretien : Davina ITTOO
Par Issa ASGARALLY
I : Vous passez d’un genre littéraire à un autre, de la nouvelle (La Proscrite) au roman (Misère). Je sais que vous avez écrit également un magnifique recueil de poèmes à partir d’un ensemble d’images. Comment se fait le choix d’un genre littéraire ?
D : Quand j’ai commencé à écrire La Proscrite, c’était dans le but de participer au Prix Jean Fanchette. Je voulais écrire un roman mais je n’avais pas le temps nécessaire. Du coup, j’ai opté pour la nouvelle. Je n’étais pas très sure également d’avoir suffisamment de confiance en moi pour entamer un tel travail qui exige beaucoup de rigueur…. La nouvelle, c’est quelque part un peu plus facile à écrire. Quand j’ai eu le prix Jean Fanchette, je me suis dit que la prochaine étape serait le roman. Quand j’ai commencé à écrire Misère, je savais d’emblée qu’il serait construit comme un roman.Pour la poésie, cela me vient plus naturellement. Dans Misère ou La Proscrite, vous croiserez parfois une prose poétique ou des fragments poétiques.Ecrire de la poésie, c’est quelque part plus « facile » pour moi…Trouver des techniques narratives pour mener l’intrigue au sein d’un roman exige beaucoup plus d’efforts.
I : Lors du lancement de La Proscrite & autres nouvelles en 2016, je disais que la littérature éclaire parfois la société autant que la sociologie. Peut-être, comme l’écrit Umberto Eco, parce que le monde fictif n’est pas en marge, mais parasitaire du monde réel. Vous semblez partager ce point de vue ?
D : Oui, que serions-nous sans les autres ? Je pense qu’en écrivant, j’ai voulu chercher des réponses, à travers l’écriture, aux phénomènes que je ne comprenais pas forcément. Après avoir vécu tant d’années en France, ce qui m’a heurté le plus à Maurice, c’est ce silence qui règne autour de ces phénomènes extrêmement graves. Pas que pour les femmes, mais en général. Je pense que c’est un pays infesté par de multiples gangrènes… La politique, le religieux, le social. Tout s’emmêle dans une fureur dangereuse…Ecrire, c’est mettre en lumière l’insupportable peut-être… Pour moi, La Proscrite comporte une dimension sociale conséquente. Mais dans Misère, j’ai pu observer autre chose, une quête plus individuelle et spirituelle qui habite les personnages…
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