Lait et miel : coupe pleine à boire jusqu’à la lie
Nous vivons dans une société où la femme est accusée de tout et elle se culpabilise pour rien. Combien de fois avait-elle dû taire ses rêves (non, trop ambitieux), ses envies (non, trop capricieuses), ses idées (non, peu pertinentes), ses souffrances (non, trop intimes) voire ses besoins (non, peu prioritaires) ?
Parce que sa réussite sera mesurée par le salaire de son mari (monsieur avec un âge « respectable », s’il vous plaît) et le nombre d’enfants dont elle arrive à s’occuper. Si un couple ne parvient pas à avoir un enfant, c’est la femme qui fait les analyses « d’abord ». Et encore, il y a d’autres niveaux à atteindre et des réalités à taire.
Si par malheur (à elle surtout), ce dit mari manque à son devoir, c’est par sa faute. Il la trompe : elle ne sait pas le satisfaire, elle ne s’occupe pas assez d’elle. Seulement, comment elle aurait pu s’occuper d’elle-même si dès le début de cette histoire, tout lui est déjà refusé ? Il la bat : elle a « forcément » fait ou dit quelque chose de travers ou il y a « forcément » une raison derrière. La seule chose derrière une gifle, c’est une main, forcément.
Si par bonheur (pas pour elle bien sûr), elle parvient à trouver un qui ne bat et qui ne trompe, mais qui se permet de la rabaisser au quotidien, elle devrait être heureuse de ne pas avoir pioché le plus mauvais. Combien d’entre elles ont dû délaisser leurs « copines » après le mariage, parce que s’amuser n’est plus de leur âge ? Il suffit de lire les publications et les commentaires féminins sur les réseaux sociaux pour évaluer à quel point elles sont frustrées. Combien de générations avons-nous vu passer dans cette chaîne de fabrique avec case de départ « naissance » et d’arrivée « donner naissance ». Et les autres sont des anomalies. Rassurez-vous, il ne s’agit pas ici de faire le procès des hommes, encore moins de rabâcher les oreilles avec les discours féministes. Il n’est pas non plus question de généraliser ni d’affirmer qu’aucun homme ne respecte aucune femme ou de prétendre qu’aucune femme n’est heureuse.
Nous vivons dans une société où la femme peut s’exprimer, mais peu d’entre elles le savent. Il est permis d’exprimer son être, de faire entendre sa voix et de se faire comprendre. Pour cela, la femme doit se comprendre et se sentir en communion avec ce qu’elle est au fond. Toutefois, après tous ces siècles de moulage de « femme parfaite» et de « modèle à suivre », il faut franchir des étapes.
Parmi ces étapes, lait et miel de Rupi Kaur. C’est « un recueil poétique que toutes les femmes devraient avoir sur leur table de nuit ou la table de leur salon » recommande Erin Spencer de Huffington Post. Par sa simplicité, ce recueil de 200 pages se dévore d’un trait. Par sa pertinence, il porte la parole de toutes ces lèvres cousues et gercées par le silence. Par sa douceur, il se lit, se relit, se relit et se relit. Au même titre que les 5 étapes de deuil, lait et miel guide la femme à s’accepter et non plus à se faire accepter. La poète (r)ouvre des blessures pour en extraire le pus et guérir la plaie, l’aider à cicatriser. Les poèmes aident même à admettre ces cicatrices, traces d’une survie, d’un combat d’exister, d’être. L’œuvre parle de souffrance, d’amour, de rupture et de guérison. Elle est surtout une main tendue, celle que toute femme attend d’attraper pour se relever. Car oui, la femme ne se relève pas forcément toute seule, qu’être l’origine du monde ne l’épargne pas des chutes ô combien terribles. Néanmoins :
Tu mérites d’être
Totalement trouvée
Dans ce qui t’entoure
Et non perdue dedans
(poème extrait de lait et miel, rupi kaur, p.171)
Mais SURTOUT
Il n’y a pas de plus grande illusion au monde
Que l’idée selon laquelle une femme
Déshonore sa famille
Si elle tente de garder son cœur
Et son corps en sécurité
(poème extrait de lait et miel, rupi kaur, p.26)
lait et miel est sans doute un premier pas vers la femme en accord avec elle-même, son histoire et son être. Vendu à plus de 3 millions d’exemplaires et traduit dans plus de 35 langues, ce recueil est certainement l’un des plus beaux cadeaux qu’on puisse (s’) offrir à la femme d’aujourd’hui. Son message est tel que le livre est resté plus de 100 semaines dans le top des meilleures ventes du new york times. Rupi Kaur est à la fois poète, artiste et performeuse. Le recueil a été traduit de l’anglais par Sabine Rolland, traductrice depuis près de 20 ans.
Pour terminer :
Tu dois
Vouloir passer
Le reste de ta vie
Avec toi-même
D’abord
(poème extrait de lait et miel, rupi kaur, p.202)
Lait et miel se boit sans modération ! À votre santé !
NA HASSI